Dans un grand entretien publié dans le numéro 14 de la revue Charles, consacré aux dynasties en politique, la dernière héritière en date de la dynastie Le Pen revient sur son apprentissage en accéléré de la politique auprès de son grand-père, de sa tante Marine mais aussi de son père Samuel Maréchal, ancien fondateur de Génération Le Pen.

 

CHARLES14_22_pour_site.jpgOn dit que Marine Le Pen est très proche de vous, que vous êtes complémentaires : quelle a été son influence sur vous ?

Elle m’échappe un peu par la dimension qu’elle prend, comme Jean-Marie Le Pen. Elle ne nous appartient plus. Enfant, j’étais très proche d’elle, j’ai été en partie éduquée par elle après le départ de mon père, donc on a une relation très affective. C’est plus qu’une tante. Nous avons vécu au même endroit durant des années. Je m’entends bien avec elle. Les médias aiment raconter des histoires, construire des oppositions entre elle et moi alors qu’il n’y a aucune concurrence politique entre nous. Je n’ai pas l’ambition ni les capacités de remplacer Marine Le Pen. On a eu des désaccords, et on s’en est expliqué, mais il n’y a pas de conflits. Je ne suis pas manipulée par mon grand-père contre ma tante, c’est totalement artificiel. J’ai d’ailleurs dit à mon grand-père que lors de ma candidature aux élections régionales, je ne ferai pas une campagne sous tutelle. Je ne suis la marionnette de personne.

Ne pensez-vous pas qu’à terme, le nombre de personnes de votre famille engagées au FN pourrait nuire à sa cohésion ?

C’est à double tranchant, mais je ne peux pas condamner ce phénomène, car il n’y a pas de cooptation entre nous. Marine Le Pen ou moi avons été élues. Il n’y a pas de népotisme, il y a une vraie légitimité de fait. En revanche il est difficile de concilier les dimensions familiale et politique. Un conflit qui aurait dû être strictement politique se transforme rapidement en conflit familial, et cela prête le flanc à des constructions médiatiques.

Prônez-vous une ligne politique différente de celle de votre père d’adoption, Samuel Maréchal ? Alors que durant les années 90, Bruno Mégret militait pour une alliance avec la droite, Samuel Maréchal a plaidé pour le « Ni droite, ni gauche, Français ».

Par « Ni droite, ni gauche », il y a l’idée de « ni UMP, ni PS » et j’y souscris totalement. Je me définis personnellement comme une femme de droite, mais je ne définis pas mon parti comme ça. J’estime qu’un mouvement politique doit être transpartisan, il ne faut pas créer de blocage idéologique chez les gens de gauche parce que l’on se définit de droite nationale. Moi, je ne suis pas partisane d’alliances avec l’UMP, mais il est sûr que je me sens plus proche d’élus UMP que d’élus de gauche. Humainement et politiquement.

Comme qui par exemple ?

Si je donne des noms, ils vont m’en vouloir. Indéniablement, j’ai plus d’affinités avec les élus UMP mais en revanche, je ne peux pas défendre une alliance de partis.

Samuel Maréchal avait milité pour la reconnaissance du caractère multiconfessionnel de la France et pour une meilleure prise en compte de l’islam au sein du mouvement. Êtes-vous d’accord avec cette ligne ?

Il avait dit que la France était un pays multiconfessionnel. Il voulait que le parti en tienne compte et s’adapte à cette donne. Cela avait provoqué un tollé en interne, alors qu’il n’avait fait que dire des réalités. Aujourd’hui quand on sait que la première religion pratiquée est l’islam, de fait, on ne peut pas dire que la France est un pays uniquement chrétien. Ça ne veut pas dire pour autant que je partage le délire du politologue Thomas Guénolé, qui affirme qu’il faut déchristianiser les fêtes religieuses. Il représente bien la tendance de notre classe politique qui voudrait que la République efface la France. Mais la France n’est pas que la République. C’est un régime politique, et il y a des monarchies qui sont plus démocratiques que certaines républiques. Je ne comprends pas cette obsession pour la République. Pour moi, la République ne prime pas sur la France. Et ce n’est pas parce que la première religion pratiquée est l’islam qu’on doit faire fi de cette dimension encore vivante qu’est la chrétienté française.

Propos recueillis par David Doucet et Mathieu Dejean

Photographie : Samuel Guigues

L’intégralité de l’entretien est à lire dans Charles n°14, Dynasties en politique, Eté 2015

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