PPDA.jpgPatrick Poivre d’Arvor a été, presque sans interruption, le principal visage de l’information française de 1975 à 2008. Dans l’extrait de ce grand entretien publié dans le numéro 15 de la Revue Charles qui consacre un dossier au couple « Politique & Télévision », le journaliste raconte comment on lui a souvent proposé à droite comme à gauche de faire de la politique, de François Mitterrand à Nicolas Sarkozy en passant par François Bayrou.

 

Quel souvenir gardez-vous de votre première interview avec le président Giscard d’Estaing?

Giscard était déjà assez directif, et moi déjà assez rétif. On s’est un peu accrochés, mais j’ai tenu bon. À l’époque, j’étais très sauvage, très timide ; souvent les timides sont un peu insolents, ils en rajoutent. Peut-être était-ce ma façon d’exister. Giscard avait l’habitude d’être servi. La période de De Gaulle n’était pas loin encore, on était toujours en monarchie. Aujourd’hui encore, rien n’a changé. Sauf qu’évidemment les monarques sont moins impressionnants qu’ils ne l’étaient à l’époque !

Vous voulez dire que la fonction présidentielle a perdu de sa superbe ?

Oui, bien sûr ! À l’époque de Pompidou, Giscard d’Estaing ou Mitterrand, on vouvoyait les présidents, ils étaient très intimidants ! Après, le rapport avec eux a changé. D’abord sous Chirac.... et puis encore plus avec Nicolas Sarkozy et François Hollande…


Est-il vrai que Mitterrand vous a proposé d’être tête de liste aux européennes, puis une place au gouvernement ?

Oui, il me l’a proposé en 1983, pour les élections européennes de 1984. La proposition est arrivée par l’un de ses conseillers, François de Grossouvre. Puis il a essayé de me « marier » avec Edgar Faure et Maurice Faure, me disant qu’on allait faire un triumvirat… Son idée était surtout d’embêter la droite, d’avoir une liste de centre gauche pour lui mordre un peu les mollets ! J’ai refusé, parce que dès la première minute le projet est devenu politicard. L’annonce dans ce bureau, sous les mansardes de l’Élysée, me faisait penser à un complot. Et puis après, j’ai reçu un appel d’Edgar Faure pour me dire qu’il acceptait de me céder sa place. Moi, je ne réclamais rien… À cette période, Mitterrand tente vraiment de me séduire. En 1988, il me demande d’être son intervieweur officiel dans le cadre de la campagne présidentielle. Là encore, j’ai refusé : je ne voulais pas donner l’impression de choisir mon camp ! Une heure plus tard, je reçois la même proposition de la part de Jacques Chirac, qui était Premier ministre et allait être son concurrent ! Une autre fois, Mitterrand m’a fait part de sa volonté de faire un gouvernement d’ouverture, avec Michel Rocard comme Premier ministre, et m’a invité à me tenir prêt. Ils vous demandent toujours de vous tenir prêt. Ils ne s’engagent jamais totalement. Il m’avait dit que je serais très bien à la francophonie.


Vous avez reçu des propositions à gauche… à droite, aussi ?

Au centre, d’abord ! Un jour François Bayrou me convie à déjeuner, au restaurant Chez Edgar. Pendant le repas, il m’annonce que « le centre, à Paris, n’existe pas. Il faut absolument qu’on ait quelqu’un qui l’incarne pour se présenter aux municipales.» En l’occurrence contre Chirac. Il m’a fait une première proposition, dans le genre : « Sois prêt pour les municipales.» Là encore, j’ai décliné. Nicolas Sarkozy, lui, m’a demandé d’être numéro 2 aux élections régionales en Île-de-France. C’était il n’y a pas si longtemps, en 2009. C’est Valérie Pécresse qui m’avait reçu. Comme je lui avais dit non, j’ai reçu un coup de téléphone de Sarkozy. Je ne l’avais pas revu depuis mon départ de TF1, quand même assez houleux… Lui aussi m’a dit : «Tiens-toi prêt, je vais faire un remaniement, d’ailleurs j’ai dit la même chose à David Douillet!»


L’intégralité de l’entretien est à lire dans Charles n°15, « Politique & Télévision », automne 2015.

 

Propos recueillis par Clémence de Blasi

 

Photographie Samuel Guigues


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